Recours du vendeur réputé constructeur
Dans un arrêt rendu le 12 novembre 2020, la Cour de cassation a rappelé quels étaient les recours possibles pour un maître d'ouvrage condamné comme vendeur réputé constructeur. Les juges ont ainsi estimé que le vendeur réputé constructeur doit indemniser l'acquéreur quand il a un intérêt direct et certain. Il a tout de même le droit d'exercer une action sur le fondement de la responsabilité décennale à l'encontre de l'assureur de l'entreprise, sans pouvoir exercer d'action sur la base de la responsabilité contractuelle de droit commun.En ce sens il conserve sa qualité de maître d'ouvrage. Zoom sur les apports de cette décision pour les vendeurs réputés constructeurs
Vente de l'immeuble dans les 10 ans suivant la réception et action du vendeur
Dans le domaine du droit de la construction, la question des recours revêt une importance fondamentale. En effet, une même personne peut tour à tour revêtir des qualités différentes. Si le maître d'ouvrage vend l'immeuble dans les 10 années suivant la réception du chantier, il est alors réputé constructeur. A ce titre, il répond de la garantie décennale vis-à-vis de l'acquéreur. Que se passe-t-il si le vendeur réputé constructeur doit indemniser le nouvel acquéreur de l'immeuble ? Sur quel fondement le vendeur peut-il agir à l'encontre du constructeur ? Autant de questions qui se posent légitimement. La situation est en effet sensiblement différente selon que le vendeur agisse en qualité de maître d'ouvrage ou bien en tant que constructeur.
Le premier élément qui apparaît ici est l'indisponibilité de l'action en réparation sur la base de la responsabilité contractuelle de droit commun. D'autre part, deux situations se distinguent :
- soit l'action est menée par le vendeur en tant que maître d'ouvrage : dans ce cas, l'action s'exerce dans les 10 ans à compter de la réception de l'ouvrage
- soit l'action est menée par le vendeur qualifié de constructeur : dans ce cas, l'article 2224 du Code civil prévoit les contours du recours entre constructeurs.
Les juges décident ici de transposer le principe déjà énoncé précédemment concernant le vendeur d'immeuble à construire pour l'étendre à toute action récursoire du vendeur dans les 10 ans suivant l'achèvement des travaux. Il n'en demeure pas moins que les désordres concernés doivent être couverts par la garantie décennale, autrement dit affecter la solidité de l'ouvrage ou le rendre impropre à son usage de destination.
Le vendeur réputé constructeur conserve qualité à agir
L'article 1792 du Code civil apporte des précisions sur la responsabilité du constructeur de l'ouvrage, y compris s'il s'agissait anciennement du maître d'ouvrage. Rappelons qu'il s'agit de cerner les contours de la responsabilité du vendeur réputé constructeur. Dans ce cas, le vendeur conserve toujours qualité à agir dès lors qu'il a un intérêt direct et certain, dans la mesure où il justifie d'un préjudice personnel. Il doit démontrer ce préjudice par différentes manières. C'est le cas lorsqu'il engage sa responsabilité vis-à-vis du nouvel acquéreur de l'immeuble ou bien quand il supporte personnellement des frais de remise en état du bien.
Dans tous les cas, la Cour de cassation recherche si le vendeur de l'immeuble conserve contre l'assureur du constructeur (de l'entreprise d'origine) un droit à action sur la base de la responsabilité décennale. Cela si le vendeur réputé constructeur a un intérêt direct et certain à l'action et qu'il peut le démontrer par des éléments probants. Si le maître d'ouvrage qui vend l'immeuble dans les 10 ans est réputé constructeur, il n'a pas la qualité de constructeur dans l'exercice des recours en garantie.
Maître d'ouvrage et prescription du recours en garantie
La question se pose également de savoir quel est le délai de prescription pour le recours en garantie du maître d'ouvrage ayant vendu son immeuble. Rappelons que l'action qu'il mène s'adresse au constructeur ou son assureur, cela grâce à sa qualité de vendeur de l'immeuble, ancien client maître d'ouvrage.
Conformément à l'article 1792-1 2° du Code civil, toute personne qui vend un ouvrage après achèvement, qu'elle a construit ou fait construire, est réputée constructeur de l'ouvrage. Il en va donc ici du maître d'ouvrage. Puisqu'il est réputé constructeur, il répond de la garantie décennale. Néanmoins, le maître d'ouvrage ne perd jamais sa qualité malgré la vente de l'immeuble. Cela explique pourquoi il peut agir dans ce délai de 10 ans à partir de la réception du chantier, pour un recours judiciaire à l'encontre du locateur d'ouvrage. Le maître d'ouvrage est réputé constructeur du fait de la vente mais pas constructeur en tant que tel. Il ne perd pas ses obligations et ses droits, en tout cas ceux qui se rattachent à sa qualité de maître d'ouvrage. Il apparaît donc ici qu'aucune action récursoire ne peut avoir lieu passé ce délai légal de 10 ans à compter de la réception de l'ouvrage.
Garantie décennale, une transmission entre vendeur et nouvel acquéreur
La garantie décennale se rattache à la propriété de l'immeuble. Cela explique pourquoi elle se transmet lorsque le maître d'ouvrage, client principal, vend l'immeuble avant la fin des 10 ans. En la matière, les juges estiment que tous les acheteurs successifs de l'immeuble peuvent agir, y compris pour les désordres apparus avant la vente et ce, malgré l'action en réparation du vendeur avant la vente. L'action se porte contre les constructeurs, sur la base de la responsabilité contractuelle accompagnant l'immeuble comme accessoire.
Cette action offerte au nouvel acquéreur ne retire pas le droit pour le maître de l'ouvrage d'agir également, mais pas sur le fondement de la responsabilité contractuelle. Ici on ne parle donc pas de dépossession mais bien de transmission. La différence est importante. La transmission implique que la propriété de l'immeuble passe d'une personne à une autre, avec les droits et obligations que cela implique. Cela, sans que personne ne soit dépossédé de son droit d'agir s'il en a un intérêt certain, autrement dit s'il a subi un préjudice qu'il peut prouver en justice. Le maître d'ouvrage peut ainsi démontrer qu'il a bien avancé les frais pour réparer les désordres affectant l'ouvrage et ce, malgré l'absence d'une mention particulière dans l'acte de vente. Un tel élément de preuve suffit à lui laisser l'opportunité d'agir sur le fondement de la garantie décennale.
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